En envisageant à l’horizon 2050, un exode urbain depuis la bande littorale côtière en direction de l’arrière païs (pays), la biorégion de la Vésubie constitue un territoire refuge privilégié dans cette zone géographique du Sud-Est de la France. Le changement climatique global et ses répercussions locales feront de la frange côtière urbaine un lieu difficile à habiter et qui ne pourra plus accueillir la densité de population présente aujourd’hui.
Sécheresse massive et continue sur la quasi-totalité de l’année entrainant la désertification des sols ; disparition des terres arables au prix d’une urbanisation massive des parcelles propres aux cultures ; pression immobilière arrivant à son paroxysme empêchant pour des raisons budgétaire l’installation sur les derniers terrains non urbanisés sont autant de facteurs présageant un exode urbain massif de la population côtière en direction des vallées de l’arrière païs.
La biorégion de la Vésubie devient, dans cette projection post urbaine, un cas d’étude intéressant et réaliste en vue de l’accueil et de l’installation de ces populations effectuant leur « migration ».
Pour préciser le périmètre de cette biorégion, nous-nous sommes basés sur l’hydrologie de la Vésubie. S’appuyant sur le relief et le bassin-versant de cette rivière aux eaux limpides et calmes qui s’est brutalement réveillée et a repris ses droits le soir du 03 Octobre 2020 lors du passage de la tempête Alex.
Crédit Photo de droite : JUSTE Maud(inette) – Saint-Martin-Vésubie avant et après le passage de la tempête Alex – Crédit Photo de droite : Photo Valery HACHE / AFP
Longue de 46 kilomètres depuis les plus hauts sommets du Mercantour jusqu’à son embouchure à Plan du Var où elle rejoint les cours du Var et de la Tinée, son bassin versant est de 395 km2.
Notre contour biorégional est encadré au nord par la ligne de crête des sommets du Parc National du Mercantour faisant frontière avec l’Italie. Au sud, elle s’arrête à son embouchure à Plan du Var avec la jonction entre les autres rivières et axes routiers descendant vers le littoral. À l’est, elle est encadrée par une ligne de crête descendant jusqu’au village de Levens avec plusieurs cols de passage et de liaison avec les vallées de la Roya, de la Bévera et du Paillon. À l’ouest, la ligne de crête partant de l’actuelle station de ski de la Colmiane descendant jusqu’au sanctuaire antique de la Madone d’Utelle avec là-aussi, plusieurs cols de passage en lien avec la vallée de la Tinée et le Val de Blore.
La biorégion de la Vésubie partage, avec ses voisines de la Tinée et de la Roya, un patrimoine naturel, culturel et architectural commun (propre aux vallées profondes et escarpées de ces territoire de montagne) bénéficiant jusqu’à 800 mètres d’altitude d’une forte influence méditerranéenne. L’olivier trouve sa place et fait l’objet de culture jusqu’à cette altitude. Échelonnée entre 140 mètres d’altitude à son embouchure et 3300 mètres au sommet du mont Gélas, elle a abrité jusqu’au début du XXème siècle une forte population recensée autour de 10 000 habitants. Après avoir chuté considérablement à 3000 âmes au cours des années 1950, la courbe de dépeuplement s’inverse depuis le début des années 2000, et la vallée voit revenir à elle des populations moins vieillissantes anticipant probablement l’exode urbain à venir. Du fait de ce fort peuplement ancien, le territoire est parsemé de villages perchés occupant les espaces stratégiques de surveillance et de contrôle de la vallée en cas d’invasions. Chaque village de la vallée a une correspondance visuelle avec des relais stratégiques qui permettait d’alerter les habitants du Sud vers le Nord en cas d’attaque remontant du bord de mer, par de grands brasiers allumés pour relayer l’information.
Le mode de vie des habitants de la vallée jusqu’à la fin du XIXème siècle était de résider principalement au sein des villages à habitats regroupés et d’entretenir deux à trois « campagnes » par famille, sur des terrains agricoles à proximité dans un rayon de 1 à 10 kilomètres autour du village. Tantôt pour la pâture du bétail, la culture céréalière et vivrière ou pour l’exploitation forestière, les anciens construisaient des granges, afin de rester sur place au cours de leurs travaux agricoles.
Isolé et parsemant les moindres recoins de la forêt ou regroupés en petits hameaux d’une dizaine de granges, ce patrimoine bâti peut être considéré comme une vraie piste en vue de l’installation de populations en cas d’un exode urbain.
La piste d’un accueil de 50 000 habitants sur le territoire de cette biorégion est envisageable avec la réhabilitation de ces granges et hameaux aujourd’hui quasiment laissés à l’abandon. La forêt ayant repris ses droits depuis l’exode de la fin du XIXème siècle, elle recouvre actuellement 95% du territoire de la biorégion, mais présente sous le couvert des feuilles, un ensemble de terrains en restanques bâtis par les anciens avec des murs en pierres sèches ouvrant la possibilité de cultures massives sur ces parcelles planes anciennement cultivées. De plus, la grande quantité d’eau douce venant principalement du massif montagneux du Mercantour assure des conditions rares dans les temps de fortes sécheresses à venir. Rappelons que plus des 2/3 de l’eau potable de Nice et ses 600 000 habitants vient de la haute Vésubie.
Conscients de cette richesse en eau les anciens avaient alimenté l’ensemble des campagnes et terrains de culture via des canaux creusés à même la roche et les sols qui sont toujours entretenus par des associations « d’arrosants », soucieux de maintenir l’acheminement de l’eau jusque dans les moindres recoins du territoire.
Cette transition par l’eau, qui sera à coup sûr l’élément vital à préserver dans les décennies à venir, nous permet de présenter les acteurs de cette biorégion qui à l’égal de petites gouttes mériteraient de se réunir et se rassembler pour former une rivière d’initiatives et de projets qui faciliteraient l’arrivée des populations de l’exode urbain sur le territoire.
Les habitants d’aujourd’hui sont pour la grande majorité des « gens du cru », des femmes et hommes des montagnes, au caractère rude lié à l’environnement et aux aléas du climat. Natifs de la vallée ces « gens d’acqui » comme ils se définissent ont une parfaite connaissance du territoire, des sources, des vallons et des chemins de montagne. Fiers de leurs traditions, ils font vivre le patrimoine culturel et immatériel de la vallée par les festins et les aubades au cours desquels résonnent le son du fifre et du tambourin.
Ces natifs de la vallée restent pour la plupart dans l’entre-soi et comme en témoignent les résultats des différents scrutins électoraux, ils ont une méfiance à l’égard des étrangers à la vallée. Pour se faire accepter par la population locale, il faut les comprendre et adopter certains codes culturels et participer à leurs évènements et rassemblements. En vue d’un exode urbain et d’une installation de population venant de la bande côtière, il faudra compte avec ces « gens d’acqui » et avec leurs traditions.
Outre cette majorité de natifs, la vallée est aussi peuplée de néo ruraux qui ont choisi de s’installer dans ce territoire de montagne pour vivre une vie plus calme, loin de l’agitation des villes. Au sein de ces familles nouvellement installées, plusieurs initiatives ont vu le jour ces dernières années. Alors que subsistaient quelques derniers paysans, on voit désormais sur les marchés de la vallée, de plus en plus d’étals de néo cultivateurs convertis à l’agriculture biologique. Un groupement de propriétaires de terrains agricoles mettant à disposition leurs terres pour de jeunes maraichers à vue le jour au sein de l’association « Les potagers de la Vésubie » qui continue de se développer et à installer chaque année de nouveaux maraichers.
La dernière partie des habitants actuels de la vallée sont les résidences secondaires, dont les occupants, venant principalement des villes de la côte, profitent le temps des vacances et des Week-ends, de l’environnement naturel de la vallée mais ne s’incluent que très peu avec les résidents à l’année. Nous sommes à ce jour en train de recenser l’ensemble des acteurs et des initiatives de la biorégion de la Vésubie et notre prochaine étape suite à ce recensement détaillé serait de mettre en place des actions de liens et de regroupement de ces acteurs notamment via l’association Festival International du Film Ecologique et Social de Cannes (FIFES) qui a pour vocation de fédérer les acteurs du territoire autour de projets transformatifs visant notamment à préparer l’accueil et l’installation des populations en vue d’un exode urbain.
Cet espace est le vôtre.
Vous souhaitez raconter comment s’est passé votre déclic, partager une anecdote liée à votre prise de conscience, exprimer une émotion ressentie par rapport à la gravité de la situation ou à l’inertie de la population, témoigner sur votre changement de vie, diffuser des conseils pratiques utiles sur l’autonomie alimentaire ou énergétique, pousser un coup de gueule, inviter d’autres personnes à découvrir l’un de vos coups de coeur, livrer le fruit de votre analyse ou de votre réflexion, proposer votre propre vision d’un avenir joyeux ou d’un futur plus sombre ?
Vous avez une vraie plume ou simplement envie d’écrire un texte, vous êtes photographe professionnel·le ou amateur·e, vous dessinez, peignez ou sculptez, vous êtes musicien·ne et vous avez composé un morceau, vous chantez ?
Nous accueillons ici tout type de contenus.
Vous êtes partant·e, mais vous n’osez pas le faire sur Facebook (ou ailleurs) de peur de provoquer des réactions agressives dans l’enfer des réseaux sociaux ?
Envoyez-nous votre contenu par mail et nous le publierons ici-même.
contribution@archipelduvivant.org
Bienvenue à toutes et tous !
Notre indépendance financière et politique est sacrée. Soutenez-nous sur Tipeee !
Impossible de mener à bien notre ambitieux projet sans vous, sans votre soutien.
En tant qu’ONG, L’Archipel du Vivant est une association à but non lucratif, au service du bien commun, qui ne relève ni de l’État, ni d’institutions locales ou internationales et dont la survie et le développement dépendent maintenant de vos dons, de vos tips.
Certaines de nos interventions sont rétribuées, mais cela ne nous permet pas de couvrir nos dépenses totales. Garante de notre indépendance, la somme récoltée grâce à cette page Tipeee nous permet d’héberger le site web, de défrayer les personnes engagées dans le projet (équipe, contributeurs·trices, prestataires…).
Pour continuer d’oeuvrer au service du Vivant et d’un monde nouveau, des initiatives alternatives et des personnes déjà engagées, tout comme des personnes qui cherchent à s’informer, s’immerger et s’investir grâce à notre site ressources et à notre espace Expression libre, votre aide est infiniment précieuse.
Notre objectif est de recueillir, grâce à vos tips mensuels de quoi rétribuer 3 à 4 personnes qui seraient totalement dédiées au dévoloppement de la résilience dans nos ambassades, lieux amis et biorégions en construction.
Chaque don – même d’un euro par mois (12 euros par an) – est utile.
Nous comptons sur vous. Un immense merci d’avance ! 😉
Pour aller plus loin, voici quelques liens utiles à découvrir sur notre site ressources :
- Géraldine, la Grande en petite tenue !
- La fin des métropoles et de l’État-nation, le début des biorégions !
- Effondrement : 50 ans que nous savons… 50 ans que nous accélerons dans la mauvaise direction
- Écologistes, comment notre manque de lucidité fait le jeu du Système dominant !
- Sauver qui ? Sauver quoi ? Le vivant, pas le climat !